Paris, le mercredi 21 octobre 2015
Copie à
M. le Président de la République
M. le Premier Ministre
Mme la Garde des Sceaux
Union syndicale des magistrats
Syndicat de la magistrature
Monsieur le Bâtonnier,
Les
avocats viennent de conduire Mme la Garde des Sceaux à renoncer à son projet de
renflouement les caisses de l’Aide juridictionnelle (AJ) par une ponction sur
les avoirs professionnels des avocats.
Qu’ils
en soient remerciés. La paupérisation de la profession d’avocat n’est en rien
une garantie de représentation pour les justiciables quels qu’ils soient.
Mme
la Ministre pouvait organiser la contribution au fonctionnement de la justice
en taxant les gains acquis par voie de justice. C’eut été un impôt sur des
gains régi par les lois ordinaires respectant la close d’universalité.
Elle
a ramené la solidarité nationale à une saisie charitable de fonds
professionnels jugés ainsi illégitimes pour disqualifier à la fois le droit au
financement public de la représentation juridique des plus faibles et la
légitimité des gains et donc de la fonction des avocats.
Cependant,
ce mouvement syndical, comme tout mouvement de ce type, laisse penser qu’il y
aurait d’un coté des avocats soucieux de leur profession et de l’autre une
ministre avide de nuire à la défense des justiciables. Le bien l’aurait emporté
sur le mal. Ce n’est pas exact.
Les
pratiques des avocats concernant les pauvres sont-elles totalement étrangères à
la mise en cause de la présence de l’Etat dans l’Aide judiciaire aux plus
démunis ? Non.
Mme
la Ministre n’a pu agir ainsi qu’en accompagnant la pratique professionnelle
des avocats.
Outre
le soutien à la politique de criminalisation de la maladie mentale qui finira
par emporter la légalité elle-même ; Les avocats participent activement à
la disqualification de l’Aide juridictionnelle et du droit à la représentation
juridique des pauvres :
1-
En diffusant une pratique restrictive de l’AJ et de l’accès au droit des plus
démunis. Il suffit d’étendre les restrictions pour contester la nécessité même
de la présence des avocats et de leurs défraiements.
2-
Par une malhonnêteté professionnelle récurrente.
Sans
qu’il soit ici aucunement question de quantité de travail ou de coût des
procédures ; la représentation juridique n’est pas la même selon que vous
payez vous-même sans difficultés ou que vous soyez sous AJ.
Le
Ministère sait par les Parquets que les avocats de pauvres sont couramment à la
botte du Parquet, de la police, voire de la partie adverse, contre leurs
clients, particulièrement dans le cas des plus faibles, tels les handicapés
mentaux.
Il
sait aussi que les Bâtonniers couvrent tout face aux pauvres.
La
mondialisation bouleverse toutes les places, n’en garantit plus aucune. Elle va
de pair avec une politique de substitution de l’espace privé à l’espace public.
Avec
les Assurances juridiques, civiles ou commerciales, les Cabinets d’avocats
poursuivent ce travail de minoration, voire de spoliation, des droits des
pauvres.
Mais
ils le font sur fonds privés et correspondent ainsi à la disqualification de
l’espace public en cours qu’accompagnent la privatisation de l’accès au droit
et la restriction de l’Aide public.
Il
ne suffira pas d’une victoire syndicale pour répondre à des questions qui ne
sont même pas encore posées.
En
vous remerciant pour votre attention, Je vous prie d’agréer, Monsieur le
Bâtonnier, l’expression de mes salutations distinguées,
Marc SALOMONE
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