Marc
Salomone /Courriel : marcsalomone@sfr.fr
blog :
madic50.blogspot.com / Livre : Les Deux Formes (Amazon)
Paris,
le vendredi 12 avril 2024
RÉFLEXION
SUR L’EXCUSE DE MINORITÉ ET PROPOSITIONS RELATIVES A LA
DÉLINQUANCE DES MINEURS
Le
dimanche 7 janvier, les média nous informent qu’un projet de loi
est en préparation pour mettre en cause l’excuse de minorité des
mineurs, au motif qu’ils sont massivement utilisés par des réseaux
adultes en raison de cette protection juridique.
Dans
la foulée d’une série de meurtres commis par des mineurs, parfois
accompagnés de majeurs, des juristes se portent garant de la licéité
d’une telle orientation.
Ce
serait une faute.
Sa
réussite entraînerait à l’égard du Parlement, du Gouvernement,
de la justice, de l’administration publique, un mépris dont leur
mémoire ne se relèverait pas.
En
effet, personne n’osera prendre sur soi les conséquences, ignobles
sur les mineurs, infamantes pour les adultes, de ce retour à un
dispositif de confusion des âges dont les effets crapuleux sont si
spectaculaires qu’ils sont la cause directe de l’Ordonnance de
1945 prise par le Gouvernement provisoire de la République
française.
La
renaissance de la France imposait de la décharger de ce crime.
Par
ailleurs, hormis des mesures propres à maîtriser la criminalité ou
l’irresponsabilité de certains parents ; le report sur les
parents de la responsabilité principale de la délinquance des
mineurs est une nuit où toutes les vaches sont grises.
Bonne
chance à ceux qui auront la charge d’en formuler ou d’en
appliquer les directives. Il est vrai que plus aucun parlementaire ni
ministre ni haut fonctionnaire ne répondra alors présent.
Dire
que les maffieux utilisent massivement les mineurs et en conclure
qu’il faut reporter la faute sur ces derniers sur les indications
des premiers est une logique intellectuelle et d’ordre public d’une
élévation hors du commun.
Elle
est inaccessible à ceux que d’aucuns appellent la Populace.
C’est
cependant à celle-ci qu’il faudra rendre compte de cette
conjonction des stratégies d’ordre public des réseaux maffieux et
des réseaux officiels ; cette bonne entente des adultes de tous
bords sur le corps des enfants.
Par
contre, si le gouvernement veut donner les moyens à la
police-gendarmerie, à la justice, aux psy, aux intervenants légaux
ou bénévoles, d’agir utilement, efficacement et humainement, sans
impliquer la société dans le dégoût et le crime, il y a des
choses à faire.
J’en
expose ici succinctement certaines.
1)-
La coresponsabilité pénale
Lorsqu’un
majeur est « accompagnant » d’un mineur ainsi
« accompagné » dans la commission d’une faute, il
endosse la coresponsabilité pénale de celle-ci.
La
loi définit la qualité d’accompagnant et d’accompagné.
Le
mineur est jugé selon la loi sur les mineurs et donc l’excuse de
minorité.
Le
majeur est jugé, pour la même faute, selon le Code pénal.
Il
en va de même pour les handicapés mentaux.
Par
exemple :
a-
le jeune Nahel, 17 ans conduisait une voiture Mercedes, voiture haut
de gamme. Elle n’était pas volée. Il ne l’a pas eue tout seul.
Si
les « accompagnants » qui lui ont fourni cette voiture
étaient coresponsables des fautes de conduites consécutives à ce
prêt, mais aussi coresponsables de la mort de ce mineur due à ces
fautes de conduites occasionnées par la fourniture de ce véhicule,
les rapports préalables de ces mineurs « accompagnés »
à leurs majeurs « accompagnants » ne seraient plus les
mêmes.
b-
de multiples mineurs conduisent de manière fautive (volontaire) en
compagnie d’un majeur.
Si
ce majeur était coresponsable des refus d’obtempérer et des
blessures occasionnés par ces fautes, y compris sur le mineurs, les
rapports entre eux ne seraient plus les mêmes.
c-
les règlements de compte à la Kalachnikov sont nous dit-on de plus
en plus le fait de mineurs.
Si
les « accompagnants » qui fournissent des armes,
commandites les meurtres, bénéficient de l’action, étaient
coresponsables des homicides occasionnés, eux étant jugés en
majeurs et le mineur bénéficiant de l’excuse de minorité, pour
le même homicide, les rapports entre eux évolueraient forcément.
d-
si un majeur prend la coresponsabilité pénale de tous les viols ou
agressions commis par les mineurs de sa bande, même s’il est
lui-même resté spectateur, voire absent des lieux de commission des
fautes, les rapports des uns et des autres changeraient.
Un
tel dispositif donnerait aux policiers les moyens d’aborder les
mineurs délinquants, leurs parents, leurs entourages, avec d’autres
armes que celles de l’impuissance à l’égard des fameux réseaux
et la subordination aux diktats de leurs animateurs voire de leurs
chefs.
Cela
implique l’obligation pour les magistrats de rechercher la
filiation majeure de la criminalité des mineurs.
Où
est la nécessité de rompre avec les principes de l’Ordonnance de
1945 ?
2)-
L’indemnisation des conséquences excessives d’une action légale
Les
gendarmes qui ont tué Adama Traoré auraient été certainement
content s’il y avait eu un dispositif légal pour les protéger des
conséquences excessives (ici mortelles) de leur action légale.
Rien
n’a changé depuis Adama Traoré.
Aujourd’hui
encore :
La
distinction entre la faute et la légalité de l’action n’est
établie qu’après une procédure de plusieurs années qui brise
les agents de l’État, érode l’autorité de celui-ci, indispose
les parties civiles et le public de plus en plus souvent mobilisé.
Vaincre
l’État ou vivre dans l’abandon par la justice, tel est le
dilemme imposé aux populations concernées.
Or,
il est possible d’établir une procédure qui garantisse le droit
et la dignité des justiciables.
La
mort de l’administré est-elle légale ou illégale ?
1-
Est-elle la conséquence d’une action criminelle d’un
fonctionnaire et donc illégale ?
Dans
ce cas, la justice suit son cours comme pour toutes les criminalités.
La
légalité de l’action concerne l’entièreté de celle-ci.
Lorsqu’un
policier se sert de l’interpellation légale d’un homme qui lui
tient tête pour le plaquer au sol et l’étouffer avec son genou,
il est possible qu’il commette un crime et que celui-ci doive être
jugé.
2-
Est-elle une conséquence logique ou possible de son mode
d’opposition aux autorités et donc légale ?
La
mort d’un homme n’implique pas que l’action légale ait été
fautive.
Dans
ce cas, la justice ayant établi le fait renvoie les policiers à la
continuation de leurs occupations professionnelles.
B-
La qualification de l’excessivité des conséquences de
l’intervention
La
mort légale d’un administré peut découler soit de son
affrontement direct avec la police (le cas des terroristes), soit au
cours de l’action légale des policiers.
Ce
qui crée de nouveaux troubles politiques à l’ordre public et qui
doit être pris en considération est l’indistinction entre une
mort due à un affrontement volontaire de l’administré envers les
forces de l’ordre et la mort due à un enchevêtrement de causes
indépendantes de la légalité de l’intervention et de la volonté
des fonctionnaires de tuer.
Que
l’action policière soit légale ou non, nul ne doit périr des
suites d’un contrôle policier et le public n’admet plus cette
mort comme évidente.
Comment
rendre compte de ces distinctions entre les actions mortelles
justifiée, criminelles, innocentes, de la part des dépositaires de
l’autorité publique ?
Cela
est possible par la création d’une nouvelle qualification légale
qui est celle de « conséquence excessive d’une action
légale ».
La
mort ou le handicap de l’administré a eu lieu dans le court de
l’intervention légale, cependant, ils ne relèvent ni du crime
policier ni du caractère criminel de la faute de l’administré.
Dans
ce cas, la justice fait le constat de cette situation et
l’indemnisation des victimes ou des ayant-droit est immédiate.
Les
éventuelles fautes professionnelles sont jugées dans la profession
et les fautes éventuelles de l’administration sont jugées comme
telles.
Concernant
la partie civile, les juges engagent une action judiciaire
d’indemnisation, conséquente et non ridicule, de telle manière
qu’elle ne grève pas le Trésor public. C’est possible.
La
justice est ainsi rendue et toutes les parties sont incluses dans son
action.
Il
est vrai que chacun est mis à sa place et que d’aucuns en sont
contrariés.
3)-
La prise en compte des visées publiques des criminels.
Lorsqu’un
criminel arrose la façade d’un immeuble à la Kalachnikov et que
l’une des balles atteint une étudiante dans son sommeil, il lui
suffit de dire qu’il ne visait que le voyou concurrent du premier
étage pour être disculpé de la volonté de tuer les autres
habitants.
Les
trompettes médiatiques qualifient en coeur la mort de cette jeune
femme de « dégât collatéral » et les tirs sont des
« balles perdues ». Les victimes « étaient au mauvais
endroit au mauvais moment », etc.
C’est
un accident de chasse.
S’il
n’a pas atteint son alter ego visé, le voyou évite l’homicidie
volontaire pour l'homicidie involontaire. Joli cadeau.
Cela
repose sur l’identification des délinquants à une action
individuelle ou corporative. Il ne leur est pas reconnu une volonté
politique de terroriser une population pour lui imposer les lois
maffieuses même si, dans un premier temps, elles ne sont que celles
du coq de village.
Or,
nous n’en sommes plus là. Les balles ne sont pas perdues pas plus
que les victimes ne sont collatérales. La présence des victimes
n’est pas incongrue.
Ce
criminel est venu ici parcequ’il y avait une population à laquelle
il voulait imposer sa loi en reprenant le territoire de son
concurrent. Il s’est adressé à elle en balayant de balles la
façade de son havre de sécurité.
L’intention
et la responsabilité plénière sont là.
Le
voyou qui arrose un lieu à la Kalachnikov et s’arroge le droit de
terroriser une population acquiert la qualité de fonctionnaire ou
stratège du crime et à ce titre toutes les morts qui en découlent
sont inscrites dans son programme et donc intentionnelles et de sa
seule autorité, indépendamment des complicités.
Au
lieu d’annoncer qu’ils sont perdus avec les balles, l’État a
quelque chose à dire aux habitants.
4)-
La dénonciation, anonyme ou signée
La
loi doit garantir à tous les citoyens, seuls ou en réunion, de
pouvoir adresser aux autorités des rapports des faits dont ils sont
témoins, une information, une dénonciation, signée ou anonyme un
compte rendu régulier, transmettre des noms, des coordonnées, des
comportements, à la seule condition que cette correspondance soit
exacte ou de bonne foi.
A
cette condition, les citoyens sont parfaitement à même de juger si
l’anonymat est la forme d’intervention qui leur convient.
Ce
n’est pas tout à fait par hasard si aujourd’hui les maffieux
dominent de larges secteurs territoriaux, voire publics, et si depuis
une trentaine d’année des pisse-copies divers associent la
dénonciation, et particulièrement la dénonciation anonyme, à la
Collaboration, aux pires des crimes, à l’infamie, au déshonneur.
Les
uns le font par désœuvrement intellectuel, les autres par bêtise,
mais certainement pas tous.
Beaucoup
l’ont fait pour préparer le terrain public au rôle à venir des
voyous dans la vie publique. Ils continuent de le faire pour
culpabiliser les honnêtes gens et garantir la sécurité des
maffieux.
Il
faut impérativement réhabiliter la dénonciation, signée ou
anonyme.
L’informatique
donne les moyens de traiter l’information de masse.
Il
est grotesque de réduire l’information sur la délinquance et la
criminalité à celle des professionnels, particulièrement quand
l’attaque crapuleuse contre la société devient un mode
d’organisation de celle-ci.
L’action
des professionnels a son espace et sa spécificité.
Elle
n’efface ni ne remplace la participation de l’ensemble de la
population à l’information des agents de l’État, des élus et
du public.
La
loi organise cette participation. Elle ne peut ni l’interdire ni la
freiner et encore moins la disqualifier.
La
culture administrative française médiatique s’est installée dans
le discrédit de la collaboration des honnêtes gens et de la police.
Pourtant,
lorsque les voyouteries engagent des politiques de populations, les
réponses reposent nécessairement sur la participation
institutionnelle des populations.
Aborder
le 21ème siècle avec une pensée administrative d’une 3ème
république rêvée est un gage de défaite.
Conclusion
Au
seul motif de leur minorité, le Général De Gaulle a gracié les
miliciens de moins de 21 ans (minorité de l’époque) condamnés à
mort en 1944. Leurs crimes dépassaient pourtant l’entendement et
leur capacité à les assumer les excluaient à priori de la pitié.
C’est
qu’en effet, il n’est nul besoin de se déshonorer pour servir
l’ordre public, donner aux représentants de l’État les moyens
légaux de travailler, et garantir à la population la justice et la
tranquillité.
En
vous remerciant pour votre attention,
Marc
SALOMONE