vendredi, février 01, 2019

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blog : madic50.blogspot.com / Livre : Les Deux formes, éd. Amazon

Paris, le vendredi 1er février 2019

CONTRIBUTION (4) AU DÉBAT NATIONAL VOULU PAR LE PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE EN 2019. L'INDEMNISATION (27) ET L'ORDRE POLITIQUE. 
(Suite de la réflexion n°26 du 20 janvier 2019, cf. : madic50)


1)- La conséquence excessive
Le samedi 26 janvier 2019, lors de l'acte 11 des Gilets Jaunes, Jérôme Rodrigue, une des figures marquantes des Gilets Jaunes, perd un œil, soit par un tir de LBD, soit par un éclat de grenade de désencerclement. En tout cas, par la police.

L'infirmité du manifestant est typiquement la « conséquence excessive » d'une action légale.
a- la victime est blessée indûment au cours d'une opération légale de maintien de l'ordre.
b- on ne manifeste pas pacifiquement pour être éborgné, handicapé.

2)- La procédure actuelle
Quoi qu'il en soit, tir ou éclat, l'affaire du barrage de Sivens nous indique que les protagonistes sont partis pour un minimum de cinq ans de procédure. Les indemnités découleront du jugement pénal.
Voir contribution n°3, du 20 janvier 2019 ; madic50.blogspot.com.

La procédure va donc installer cinq années de confrontations artificielles entre la police et le camp civil qui soutient M. Rodrigue.

Du fait de la procédure en cours, la justice est prise en otage par un transfert vers le Tribunal de la confusion des fautes présumées avec l'indemnisation des victimes et aussi du débat politique.

La procédure fait de la victime un drapeau. Cet étendard est brandit par les cercles qui s'organisent contre l’État et le gouvernement.

Le tribunal est leur champ de bataille. Il est le lieu de convergence des mobilisations civiles et étatiques.

Ainsi, les magistrats ne pourront-t'ils pas clore le procès par un non-lieu ou des peines de principe s'ils l'estiment justifié.

Le non-lieu pour cause de légalité de l'action initiale et d'irresponsabilité pénale du fonctionnaire signifierait dans les faits que la victime a perdu un œil sans que personne n'en réponde.

La conséquence exorbitante d'un acte légal mais outrancier dans ses conséquences ne serait pas reconnue comme une faute imputable au donneur d'ordre ; en l'espèce l’État.

La justice apparaîtrait comme féodale. D'autant plus que cela priverait sans doute la victime d'une indemnisation.

Il faudra donc probablement convaincre le fonctionnaire qu'il a commis une faute de son propre chef et qu'il doit en assumer le prix pénal pour que tout rentre dans l'ordre.

A ce sujet, le débat sur le « tir » ou « l'éclat » départage ceux qui veulent :
a- imputer la faute au seul policier et avoir un coupable visible qui permette à chaque camp de crier victoire.
b- dissoudre les responsabilités dans l'action administrative générale et octroyer une victoire publique à la seule police.
c- Dans les deux cas, les procès d'aujourd'hui sont la source de légitimité des affrontements de demain.

Dans tous les cas, la procédure actuelle semble d'abord favoriser les troubles publics :
a- elle est injuste envers les victimes reconnues telles.
b- elle crée artificiellement des conflits entre la justice et la police, la gendarmerie.
c- elle est un tremplin pour la mobilisation civile contre l’État et ses organisations.

3)- La voie séditieuse
Contrairement aux masques victimaires des séditieux ; nous ne sommes pas dans l'examen d'une faute personnelle ou d'une faute de moyens techniques légaux.

Dans ces affaires, ce n'est plus la hiérarchie administrative qui juge de la qualité d'une action légale et transmet les fautes à la justice.

Ce sont les contrevenants séditieux qui subordonnent la justice à un rapport de force pour la conduire à juger de la légalité de l'action publique.
Au travers de l'examen des « conséquences excessives » d'une action légale c'est la légalité des forces de l'ordre et consécutivement de leur action qui est mise en cause.

C'est par le truchement de l'action légitime des plaignants que les séditieux imposent leur direction politique aux démocrates qui demandent des comptes sur les actions légales.

C'est ce qui a échoué à Paris en Mai 68 et a réussi à Kiev, Place Maïdan, en 2014.

Dans les moments de troubles, la procédure en cours véhicule cet imbroglio et les marchandages qui permettent d'y palier provisoirement.

Combien de temps les policiers et les gendarmes vont-ils accepter de maintenir l'ordre sous le contrôle politique des contrevenants séditieux que permet la procédure ?

En définitive, quelque soit l'issue du procès, l'autorité de l’État et l'unité nationale seront atteintes. Comme tant d'autres, la victime ressortira affaiblie de ce parcours judiciaire.

4)- Une nouvelle procédure
Comme pour nombre de ces affaires, il serait possible que le Chef de l’État permette l'expérimentation d'une autre procédure.

Celle-ci reconnaîtrait aux victimes la réparation de leur dol et à la justice la qualité de juger sereinement. Elle renverrait la politique au débat public.

Les principes en sont les suivant :
1- La procédure distingue le pénal de l’indemnisation.
2- Le procureur de la République examine le statut du plaignant de victime de la « conséquence excessive » d'une action légale.
3- Si ce statut n'est pas reconnu, le plaignant est subordonné au parcours judiciaire jusqu'au procès pour faire valoir son point de vue.
4- Dès lors que celui-ci est reconnu légalement, l'indemnisation s’établit à partir de la détermination de la seule source générale du dol ; en l'espèce de la police donc de l’État.
5- Cette indemnisation ne coûte rien ou quasiment rien au Trésor public. Elle n'en est pas spoliatrice. Elle peut donc être enfin convenable.
6- Le pénal ne concerne plus que l'examen des faits et des responsabilités de chacun.

7- L'enquête pénale et l’enchaînement des procès peuvent donc durer le temps professionnellement nécessaire sans léser la victime.
8- La partie civile est éventuellement présente comme témoin de l'impartialité du procès.
9- La victime est présente si cela est nécessaire à l'examen des faits par le Tribunal.

De cette façon :
a- la victime et son dol ne sont plus un drapeau mais une personne et un dommage réparé.
b- les organisations civiles ne peuvent plus prétendre défendre la victime pour mobiliser contre l’État.

5)- Conclusion
La seule utilité et légitimité de l'actuelle procédure est d'exister, d'être là.

Elle laisse l’État subordonné à l'anéantissement de la victime ou de l'agent de l’État qu'elle accuse. Dans les deux cas, elle déconsidère celui-ci.

Or, il est possible d'introduire de la diversité de solutions, de l'intelligence et de l'efficacité.

Compte tenu des injustices que provoque l'actuelle procédure, des prédations du Trésor public qu'elle engendre, des troubles à l'ordre public dont elle est devenue l'un des vecteurs majeurs, il serait temps d'expérimenter son remplacement afin que le Parlement puisse y pourvoir.


Marc SALOMONE

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