samedi, juin 01, 2019

01.06.19, contribution 21, indemnisation 31, cour d'assises, policiers,

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Paris, le samedi 1er juin 2019


CONTRIBUTION (21) AU DEBAT NATIONAL VOULU PAR LE PRESIDENT DE LA REPUBLIQUE EN 2019.
L'INDEMNISATION (31), LA PROCEDURE ET LE RENVOI EN COUR D'ASSISES D'UN POLICIER. (Suite de la réflexion n°30 du 29 avril 2019 et la numéro 29 du 5 avril 2019, cf. : madic50)

Lors de précédentes réflexions sur l'usage politique et judiciaire de l'indemnisation (cf. : le 1er février 2019), je développe la conception d'une nouvelle procédure judiciaire et j'en propose l'expérimentation.

Un policier est envoyé en Cour d'Assises pour des faits découlant de l'exercice de ses fonctions.
La qualification du renvoi est : «violences volontaires par personne dépositaire de l'autorité publique ayant entraîné une mutilation ou une infirmité permanente».

Les magistrats agissent ainsi qu'ils l'entendent et la procédure suivra son cours.

Ce renvoi à des effets :
1- Au sein de l’État, entre policiers et magistrats, entre le pouvoir exécutif et l'Autorité judiciaire, entre exécutants et hiérarchie des forces de l'ordre.
2- Entre l’État et la population, par la disqualification des fonctionnaires exécutants des forces de l'ordre.
3- Entre l’État et les activistes.
3- Les conséquences politiques sont donc à venir.

L'objet de cette réflexion porte sur la mécanique légale et ses évolutions possibles.

En effet, l'action judiciaire se présente ici comme la mise en œuvre d'une mécanique : il y a « mutilation ou infirmité permanente » donc il y a Cour d'Assises.

Cet engrenage est certifié par l'argument de l'opposition à ce renvoi formulée par le Parquet, en vue de renvoyer le policier au Tribunal Correctionnel. Il a voulu faire passer la destruction d'un œil pour une perte temporaire de la vue en raison de possibles solutions techniques à venir. Il perd sur la constatation de la permanence de l'invalidité.



Cette mécanique judiciaire peut sembler une application stricte du droit.
a- C'est le cas dans cet enchaînement logique de violences qui provoquent des mutilations permanentes, lesquelles entraînent la Cour d'Assises.
b- Mais même quand la loi n'organise aucun engrenage, les magistrats sont dans une
mécanique qui les amène à conformer les faits à une légalité accusatrice.

Ainsi, dans l'affaire Saboundjian, le jury populaire a acquitté le policier, en 2013. En Appel, le jury composé de magistrats a condamné le susdit, en 2017.

Cette mécanique est constituée par la subordination absolue de l'appréciation du dol au parcours pénal.

Nous voyons à l'action du parquet pour éviter la Cour d'Assises au policier que la détermination du dol est complètement subordonnée au parcours pénal. Elle n'est qu'un enjeu de fonctionnement de la procédure pénale. Sa seule conclusion est la qualité du renvoi : Cour d'Assises ou Tribunal Correctionnel.

Il s'en suit, qu'à partir du moment où la justice ne peut pas reléguer les plaignants dans l'oubli, la mise en accusation est obligatoire pour leur permettre de faire valoir leurs droits à réparation.

Cette mise en accusation est en fait une mise en culpabilité. La reconnaissance de celle-ci est le seul moyen d'apprécier le dol et d'indemniser la victime. Cela prendra plusieurs années.

La logique de cette mécanique légale est donc prioritairement la production initiale d'un coupable.

La justice nomme la faute qui lui est offerte et qualifie coupable avant le jugement la personne qui est désignée ainsi publiquement.

Le prévenu est donc déjà inscrit dans la culpabilité par son seul renvoi à la Cour d'Assises.

Il s'agit bien là de la désignation initiale d'un coupable. L'inculpation décide du verdict de culpabilité. Le Tribunal a perdu sa fonction souveraine. Il ne fait qu'aménager la peine requise préalablement à sa réunion.

L'exclusivité pénale de la procédure ôte aux magistrats les moyens procéduraux de distinguer entre un « responsable » dont la faute est professionnelle et peut donner lieu à un jugement et un « coupable » dont l'action est criminelle.
a- Soit, ils donnent quitus au policier de l'usage légal de la force. Ils déboutent alors les plaignants et les renvoient à leur douleur sans fin.
b- Soit, ils produisent un coupable, le jugent et de façon programmée le condamnent. Ils donnent alors raison au plaignant, en l'espèce un manifestant.


Ce faisant, aucune instance judiciaire n'est habilitée à distinguer la reconnaissance du dol et de sa réparation, de la faute pénale éventuelle et de son jugement.

A partir de là, la production d'un coupable devient la finalité de la procédure afin de rendre raison au plaignant et de l'indemniser. C'est au seul titre de la reconnaissance de cette culpabilité du prévenu et de sa condamnation que le plaignant peut être indemnisé.

La conséquence pratique de cette belle mécanique est de subordonner la justice aux conflits politiques qui ont provoqué les heurts dont elle juge.

Sous les apparences des évidences de la procédure, l'exclusivité pénale de la procédure conduit à la production d'un coupable initial et celle-ci ouvre l'espace d'une prise de parti dans le conflit en cause.

Dans l'affaire Saboundjian, le procureur général se tournera vers la partie civile en audience et lui fera part de son soutien.
Dans l'affaire Legay, il est manifeste que le policier mis en cause est substitué au donneur d'ordre.
Dans l'affaire du policier M., de 2016, nul ne cache que la justice répond à des attentes politiques civiles.
Etc.

Il ne faut pas s'étonner que les réseaux de confrontations politiques, même sous d'autres noms, arrivent dans les prétoires si la procédure elle-même les y appelle.

En effet, pour les réseaux politiques modernes, cette procédure devient le réceptacle des conflits politiques civils dont ils vivent. Elle est leur nouveau terrain d'exercice.

L'accès à la justice devient un des buts de l'action politique. La culpabilisation préalable d'une cible est le moteur de cette pénétration.

Ces groupes politiques placent les policiers en accusés judiciaires aux titres de leurs violences comme ils placent leurs interlocuteurs en accusés judiciaires au titre de la criminalisation de leurs opinions.

Le jugement d'un policier devient la redite de la confrontation civile. Mais cette répétition propulse les groupes politiques au sein de l’État.
a- Les civils marquent un point en plaçant le représentant de l’État au banc des accusés.
b- Par ce biais, ils obtiennent une redéfinition de leurs rapports à la police dans leurs combats civils ; aussi bien dans la rue que dans les institutions.

Les policiers ne vont pas en Cour d'Assises en étant déjà coupables du seul fait de la procédure.



Celle-ci n'est mise en œuvre que parceque l'exclusivité de la voie pénale et de l'inculpation préalable d'une cible permet, aux forces politiques qui s'organisent dans les prétoires sous couvert de soutenir la victime, de faire accepter par la justice la construction d'une revendication d'équilibre des forces qui exige la nomination initiale, autrement dit le sacrifice, d'un coupable.

Ces groupes peuvent y voir une préemption de la justice.

Les magistrats se pensent les Maîtres d'une procédure qu'ils manipulent constamment. Or, dans certaines circonstances, ils en sont les jouets.

Au vu des résultats, il est légitime de s'interroger sur l'efficacité de ce parcours judiciaire.

Les magistrats agissent selon la procédure, certes, mais est-ce la bonne ?

Une procédure qui distinguerait d'emblée le pénal de l'indemnitaire changerait les modalités de fonctionnement de la justice dans ce type d'affaires.

Elle permettrait :
1- De dégager la justice de l’ambiguïté des liens de la procédure actuelle avec les conflits politiques qui l'accompagnent.
2- Une indemnisation, non spoliatrice du Trésor public, qui soit conséquente. Les victimes de l'affaire du Médiator disent « décente ».

3- L'étude sereine par la justice de tous les aspects d'une faute présumée des fonctionnaires de l'ordre public (tels les rapports hiérarchiques et l'utilisation de la police en compensation de l'absence de la politique).
4- La distinction des conséquences directes et des conséquences excessives d'une action légale.

Il est de l'autorité solitaire du Chef de l’État d'expérimenter certains aspects de cette évolution de la procédure ; telles que les modalités de l'indemnisation.

L'affaire Servier, dite affaire du Médiator, a déjà mis en place cette séparation mais au titre d'arrangement entre les victimes et l'entreprise concernée. La justice est là en fonction d'Appel.

Or, seuls les magistrats peuvent diriger l'indemnisation et le pénal.

Manifestement, la procédure en cours est inapte à répondre à la complexité des situations et aux questions judiciaires posées.

La seule méthode de sortie de cette impasse est la réflexion.

Si on en croit les syndicalistes policier elle devient urgente.
Marc SALOMONE

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